Fonction Publique : danger grave et imminent
Le projet de loi « transformation de la Fonction publique » qui a été présentée aux organisations syndicales n’est ni plus ni moins qu’un projet de destruction du statut d’une brutalité inouïe. Ce sont les équilibres du statut de 1946, réaffirmés par les lois de 1982 à 1984, qui sont piétinés, et avec eux la conception d’un fonctionnaire citoyen au service de l’intérêt général opposée à celle d’un fonctionnaire « aux ordres ». C’est tout le modèle social français et la garantie de neutralité des agents publics qui sont dans le viseur du gouvernement.
Les garanties contre l’arbitraire pour les personnels et donc les usagers sont attaquées :
- Commissions paritaires vidées de leur substance et ce dès le 1er janvier 2020 : le projet de loi prévoit de ne plus donner aucun droit de regard sur les actes de gestion des agents (mutations, promotions, etc). C’est l’administration qui affecterait ou nommerait de manière unilatérale, en toute opacité, sans aucune vérification par des élus du personnel du respect des droits de chacun, sans possibilité pour les personnels de contester les décisions autrement que devant les tribunaux administratifs. Le gouvernement entend soumettre les personnels au bon vouloir de l’autorité hiérarchique, c’est une régression historique de leurs droits et donc de ceux de toute la population.
- Remise en cause des prérogatives et des moyens de fonctionner des CHSCT (comités hygiène, sécurité, conditions de travail) : cela entraverait le contrôle par les représentants des personnels des obligations des employeurs publics et des chefs de service en matière de santé et sécurité au travail. Le projet restreindrait les possibilités d’intervention des représentants des personnels pour l‘amélioration des conditions de travail dans le cadre d’une nouvelle formation fusionnant CHSCT et Comité Technique.
- S’attaquer au statut en favorisant le contrat : l‘objectif des services publics est de servir l’intérêt général, le statut des fonctionnaires est défini par la loi pour répondre à cet objectif. Le projet prévoit un élargissement des dérogations au principe du recrutement d’un fonctionnaire sur un emploi permanent et la création d’un « contrat de projet » (contrat qui peut s’achever une fois que la mission est terminée). Or, les dérogations sont déjà nombreuses et expliquent que 20% des agent-es ne soient déjà pas titulaires. Aller plus loin, c’est la mise à mort du statut: laisser aux employeurs publics la « liberté » de recourir à du personnel précaire ou titulaire, c’est faire de la précarité la voie principale et bientôt quasi unique de recrutement. Défendre le recrutement de personnel statutaire, c’est à l’inverse défendre notre modèle d’égalité d’accès aux emplois publics, d’indépendance des fonctionnaires au service de l’intérêt général.
- Evaluation des personnels et retour de la méritocratie
Alors que les études montrent que le développement du salaire au mérite détruit les collectifs, génère du travail inutile et dégrade le service public au lieu de le rendre plus efficace, le projet de loi envisage de supprimer les notions d’évaluation et de notation pour, sur la base d’entretiens professionnels « apprécier la valeur professionnelle » (il s’agit de mieux reconnaitre le mérite). Les avis littéraux de la hiérarchie sont dépendants du lien entretenu avec elle et sont source d’arbitraire ne permettant plus d’interroger les différentes situations entre elles et d’une année à l’autre. Le « mérite » est un système inique qui exclut nombre de collègues et qui nuira à nombre d’avancement et de promotion.
- Sanctions
Le projet modifie la loi pour permettre au supérieur hiérarchique direct de prononcer une exclusion temporaire de fonction de trois jours. Alors qu’aujourd’hui les sanctions disciplinaires existent et passent par les CAP en présence d’élus des personnels, cette sanction serait prise sans aucune procédure disciplinaire et serait inscrite au dossier du fonctionnaire et potentiellement effacée au bout de trois ans. La docilité aux injonctions, à la mise en œuvre des réformes quelles qu’elles soient, au devoir de réserve initié par la loi Blanquer se renforcent donc d’un dispositif coercitif pour faire des fonctionnaires de simples applicateurs des volontés ministérielles.
Ce projet de loi est d’une extrême gravité pour les fonctionnaires dont les enseignants mais aussi pour l’ensemble de la population (nous réalisons des dossiers spéciaux et un bulletin toute profession pour sonner l’alarme), le SNEP-FSU appelle à se mobiliser pour en exiger le retrait par la multiplication d’actions locales et par la participation massive aux dates nationales de mobilisation :